Au Japon, de nombreux rites sont attachés au shogatsu, la célébration traditionnelle des premiers jours de l’année. Les plus courants sont les nourritures bien sûr, telles que le repas de nouilles soba (de longs spaghettis de sarrasin symbolisant une longue vie) le 31 décembre et le bouillon de poulet ozoni au mochi (pavé de pâte de riz), en buvant du saké …. le matin du 1er janvier, ou encore la première visite en famille au temple shintō.
Moins courante aujourd’hui est la coutume de se lever tôt pour aller contempler le premier lever de soleil – hatsuhinodé – ou, dans les voies traditionnelles, faire la « première pratique » – hatsukeiko. Lorsque nous pratiquions au Japon, nous avons eu de nombreuses occasions de contempler le lever du soleil dans le prolongement de notre bokutō ; soit le 1er janvier, soit un peu plus tard au moment du kangeiko. En France, nous en avions perdu l’habitude en raison de l’orientation plein Ouest des plages atlantiques, celles de la Charente Maritime ne font pas exception. Mais nous avons à Port des Barques le privilège d’une petite île aisément accessible en voiture par une passe très tôt découverte par la marée, l’Île Madame. Nous y avons trouvé une petite plage regardant vers l’Est par-dessus un bras de mer suffisant pour refléter le soleil. Mi-décembre nous y sommes allés en repérage par un beau dimanche matin et nous en sommes revenus enthousiasmés
Nous avons donc annoncé au groupe notre intention d’aller, selon la tradition japonaise, contempler le lever du soleil le matin du premier janvier, invitant quiconque serait en forme ce matin-là à se joindre à nous. Saint Sylvestre oblige, nous pensions motiver deux ou trois personnes mais à notre grande surprise huit pratiquants et quelques conjoints ont répondu à l’appel. A huit heures tout le monde était au rendez-vous de la passe conduisant sur l’île. Nous avons rempli quelques voitures et dès que la mer s’est retirée nous avons traversé. Comme nous avions prévu large nous étions sur place bien avant le lever du soleil, prévu à 8h46.
La météo n’était pas aussi idéale que la première fois, avec un ciel couvert mâtiné d’un petit vent bien frisquet. Mieko a eu tôt fait d’entraîner tout le monde dans un jumbi revigorant, suivi de la première partie de Taymio. La magie du keiko a tout de suite opéré, nous faisant tranquillement nous fondre dans le décor naturel, si bien que lorsque nous avons entamé la méditation aux dix positions, la concentration était là sans aucun effort. Nous avons ainsi sereinement contemplé le lever du premier jour de l’année sur notre village embrumé de l’autre côté du bras de mer.
Après le salut final, tout le monde parlait en même temps dans une joyeuse ambiance et nous avons partagé une tarte aux pommes, arrosée du traditionnel citron-miel des kangeiko ainsi que d’amazaké, une boisson de riz fermenté agrémentée d’une bonne dose de gingembre. Puis nous avons traversé dans l’autre sens avec la ferme intention de réitérer ainsi l’aube de chaque année nouvelle.
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